Montre tes yeux

mathieu farcy

  • Exposition

31.01 - 26.04.2025

  • Strasbourg

VERNISSAGE

31 JANVIER À 18H

ENTRÉE LIBRE

MERCREDI – SAMEDI

14H – 18H30

communiqué de presse

RÉSIDENCE DE CRÉATION

D’amour et de rage

ÉVÈNEMENTS AUTOUR DE L’EXPOSITION

Rencontre publique avec Mathieu Farcy

Une exposition portée par Stimultania pôle de photographie à Strasbourg.

En lien avec l’exposition d’Arno Brignon, du duo PLY (Mathieu Farcy et Perrine Le Querrec) et de Marine Lanier Ce silence est bruissant de paroles présentée à la Filature du 25 janvier au 23 mars 2025.



Exposition soutenue par la DRAC Grand Est, la Région Grand Est et la Ville de Strasbourg.

Cet édito pourrait s’accrocher aux mots de Peter Handke, choisis par Mathieu Farcy pour entrer dans l’exposition comme on se déchausse avant de rendre visite à un être cher. Cet édito pourrait s’accrocher aux recommandations de Nova car le temps est favorable aux préceptes. Nous serions alors dans le vestibule, dans l’avant des tirages et des dessins, dans l’avant du faire.

Nova dirait : Il ne tient qu’à toi de regarder avec attention. Regarder et peindre. D’abord des traits horizontaux, puis des traits verticaux et quand tes traits sur le papier seront empreints de vie, tu passeras aux vaincus et aux vainqueurs, aux orteils coupés, aux penchés, aux peaux et aux ombres. Aie l’habitude de tenir en main un fil de plomb pour pouvoir apprécier l’inclinaison des choses.* Change le monde par ton art, concentre-toi, ne regrette rien, une attention qui n’est pas joyeuse ne vaut rien. Pense au cercle par lequel tout commence, au vert de gris, au charbon. Ecoute et ferme les yeux.

De là viendra le mouvement, car l’œuvre induit le mouvement, le renouveau.

Une fois le seuil passé, nous constaterions le mouvement. Car les images de Mathieu Farcy conduisent au mouvement. Chaque œuvre créée a produit une mémoire nouvelle, un désir nouveau. Les personnages, femmes, hommes ou animaux, ont modifié leur trajectoire. La pensée même des œuvres, leur matérialité puis leur soudaine, imposante, verticalité ont réveillé leurs tremblements. Ils marchent à grand pas. 

Jamais je n’ai entendu un artiste ainsi employer le mot joie. 

Céline Duval

97. Reproduction d’un nu ou d’autre chose d’après nature, Le traité de la peinture de Léonard de Vinci, chez Jean de Bonnot, 1977. 

Peter Handke, Par les villages

– Mais maintenant tu vas me dire ce que je dois faire : – Joue le jeu.

Menace le travail encore plus. Ne sois pas le personnage principal. Cherche la confrontation, mais n’aie pas d’intention. Évite les arrière-pensées. Ne fais rien. Sois doux et fort. Sois malin, interviens et méprise la victoire. N’observe pas, n’examine pas, mais reste prêt pour les signes, vigilant. Sois ébranlable. Montre tes yeux, entraîne les autres dans ce qui est profond, prends soin de l’espace et considère chacun dans son image.

Ne décide qu’enthousiasmé. Échoue avec tranquillité. Surtout aie du temps et fais des détours. Laisse-toi distraire. Mets-toi pour ainsi dire en congé. Ne néglige la voix d’aucun arbre, d’aucune eau. Entre où tu as envie et accorde-toi le soleil. Oublie ta famille, donne des forces aux inconnus, fous-toi du drame du destin, dédaigne le malheur, apaise les conflits de ton rire. Mets-toi dans tes couleurs, sois dans ton droit, et que le bruit des feuilles devienne doux. 

Passe par les villages, je te suis.

Peter Handke, Par les villages. Poème dramatique traduit de l’allemand par Georges-Arthur Goldschmidt, Gallimard, 1983.

Montre tes yeux présente quatre projets qui ont pris forme dans les cinq dernières années. 

« Saints Loups a été créé lors d’une invitation dans le quartier Saint Leu de la ville d’Amiens et d’amour et de rage a été créé à Givors dans le cadre d’une invitation faite par Stimultania. Ces deux projets ont pour visée de produire une œuvre collective à partir des légendes et des mythologies de celles et ceux qui ont travaillé avec moi. Ils participent du même besoin, faire corps. Ils s’inscrivent dans l’écoute de celles et ceux qui vivent dans des territoires délaissés.

Les deux projets suivants, Asiles et Les alliances animales, montrés ici au stade d’esquisses, sont les ricochets des travaux précédents. Ils prolongent la nécessité de faire ensemble en tentant de déjouer le langage, à partir du geste. Asiles est un projet d’art en commun pensé avec des personnes exilées. Il s’agit ici de créer ensemble des refuges, réels ou imaginés, des espaces mentaux, symboliques, actifs. Les alliances animales sont un ensemble d’expériences de créations nomades, avec les animaux dans leurs territoires, ainsi qu’avec celles et ceux qui vivent des devenirs-animaux. Nous développons une attention mutuelle, créant les conditions d’une présence épaisse.

Les tentatives présentées ici partagent toutes les mêmes racines : les convictions farouches
Que créer peut être fait avec l’Autre.
Que nos rencontres sont des œuvres d’art.
Que chaque personne porte en elle des mythologies.
Que les images produites par l’écoute sont des amulettes chargées de sens.
Que les montrer peut être un besoin.
Qu’en nos temps troublés, l’attention mutuelle est une piste joyeuse. »

Mathieu Farcy


Mathieu Farcy, né en 1985, vit à Marvejols. Photographe après avoir été éducateur spécialisé, Mathieu Farcy place la question de la «  disqualification sociale  » au centre de son travail. L’intérêt qu’il porte à la parole et à la place d’autrui dans la société n’a cessé de traverser sa pratique photographique. Ses différents travaux s’inscrivent dans une réflexion autour de ce qu’il nomme des “documentaires horizontaux”, dans lesquels il implique les participants et les considère comme tout autant responsables de la création que lui. [Circulation(s) festival de la jeune photographie européenne, 2019]

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